Expo: Füssli au musée Jacquemart-André

Expo: Füssli au musée Jacquemart-André

Paris Vox – PRES D’UN DEMI-SIÈCLE APRES L’EXPOSITION DU PETIT-PALAIS, LE MUSÉE JACQUEMART-ANDRÉ PRÉSENTE LE PEINTRE FÜSSLI, DONT LES TOILES PARTICIPENT DU ROMANTISME ANGLO-SAXON.

Plusieurs peintures de Johann Heinrich Füssli (1741-1825), né en Suisse et dont la carrière se déroula en Angleterre, appartiennent à l’imaginaire européen commun. Ainsi du Cauchemar, qui illustra longtemps l’édition en Livre de Poche des Histoires extraordinaires de Poe, ou de Lady Macbeth somnambule, choisie pour la couverture de la pièce de Shakespeare en Folio. Cela dit bien le lien, direct ou indirect, qui existe entre son inspiration et la littérature. Littérature biblique dont le nourrissent ses études de pasteur (il est nommé pasteur zwinglien en 1761) mais également littérature profane qu’il dévore en marge de ses études. Cependant le pastorat ne le passionne pas : c’était surtout la volonté de son père qu’il suive cette voie. Füssli voyage en Allemagne, en Angleterre, en France, en Italie. Encouragé par Joshua Reynolds, qui préside la Royal Academy, il peint, dessine, écrit, rencontre Hume et Jean-Jacques (il est marqué par les idées des Lumières et la Révolution française trouvera en lui un admirateur – jusqu’à la décapitation de Louis XVI). C’est en 1780 qu’il se fixe définitivement à Londres.

Füssli puise donc ses sujets dans sa bibliothèque : récits bibliques, légendes nordiques (Siegfried terrassant Alberich), littérature antique (La mort de Didon ; Ulysse et Leucothéa), Walter Scott, Wieland, Milton et son Paradis perdu… et plus que tout, Shakespeare. Mais sa peinture n’est pas « littéraire », assujettie au texte. Il tire de celui-ci une image forte, traitée d’une manière large et expressive qui rachète ce que sa technique a parfois de faible, car il est meilleur dessinateur que peintre. On discerne dans sa manière l’influence du maniérisme et du baroque italien, mais aussi du classicisme. Et naissent sous nos yeux l’imagerie et l’imaginaire romantique qui arriveront quelques décennies plus tard en France : rêves et cauchemars, visions et apparitions, sorcellerie et drame, mystique et féerie.

Le cauchemar (1810), où une affreuse créature – le « chauche-vieille » des contes d’Henri Pourrat – oppresse une jeune femme endormie, est son tableau le plus célèbre. L’intérêt de l’exposition est de nous en faire découvrir bien d’autres, comme Le Rêve de la reine Catherine (d’après Shakespeare) ou ce berger endormi qui se trouve être Lycidas, héros d’un poème de Milton. (Exposition jusqu’au 23 janvier 2023.)

Johann Heinrich Füssli (1741-1825), Lycidas, 1796-1799, huile sur toile, 111 x 87,5 cm, collection particulière © Studio Sébert Photographes