Paris Vox (Tribune) – Chaque semaine, en partenariat avec Radio Libertés, nous publions la retranscription écrite de la chronique d’actualité et d’analyse d’Arnaud De Robert. Aujourd’hui, il revient sur l’expérience des “poubelles-robots” lancée par la SNCF et qui se révèle moins anecdotique qu’il n’y paraît.
L’autre jour j’attendais tranquillement mon train à gare de Lyon lorsque j’ai vu débouler un drôle de petit engin blanc et bleu qui se déplaçait doucement à proximité des quais. Intrigué, je me suis approché d’une sorte de robot d’environ un mètre de haut, de forme arrondie, à mi-chemin entre le R2D2 de Star Wars et un aspirateur que l’on aurait redressé sur ces roues. A quelques centimètres de moi, l’automate s’est immobilisé m’autorisant à comprendre sa finalité. Il s’agit en fait d’une poubelle, enfin plus exactement d’un robot-poubelle. La présence d’affiches annonçant sa phase de test m’a permis peu après d’apprendre que B.A.R.Y.L – c’est son nom – est effectivement un robot-poubelle de soixante litres de contenance, capable de se déplacer seul dans la gare, d’être héler par un passant désireux de se défaire de déchets et enfin de savoir quand il est plein pour retourner à sa base faire opérer un changement de sac. J’ai voulu savoir le pourquoi du comment de ce test grandeur nature et j’ai trouvé plusieurs articles décrivant cette expérience bien moins folklorique qu’il n’y parait. On y apprend tout d’abord que ce robot est une commande de la SNCF et qu’après sa phase test, si elle est satisfaisante, nous allons le retrouver dans toutes les gares de France et de Navarre. Oui partout. Et c’est à partir de ce moment-là que mon amusement a fait place à des interrogations moins plaisantes. Bien sûr, la direction de la SNCF la communication se veut très rassurante. B.A.R.Y.L ne remplacera pas les poubelles fixes ni ne diminuera le nombre d’agents de nettoyage. D’ailleurs, sa fonction serait plutôt pédagogique, le côté ludique du robot incitant les gens à une plus grande propreté. Donc si l’on en croit la version officielle, pas de soucis, B.A.R.Y.L ne vient pas tuer l’emploi. Moi, j’aime bien les versions officielles parce qu’elles sont toujours lisses, empathiques, positives et joyeuses. Mais derrière ce petit théâtre technologique du troisième millénaire ce profile une réalité déjà maintes fois évoquées par votre serviteur mais qui ne semble nullement encore être au cœur des préoccupations de nos contemporains. Parce qu’à gare de de Lyon, les usagers peuvent aussi croiser un autre robot. Moins sexy que B.A.R.Y.L., d’un bleu très réglementaire, Swing-Bot est un robot laveur de sol qui opère déjà depuis plusieurs mois dans certaines gares françaises. Pour lui, la phase de test est terminée, il travaille. Peu de communication sur Swing-Bot, c’est de la pure technologie, moins récréative que B.A.R.Y.L, moins en interface avec les usagers aussi.
Et pourtant Swing-Bot nettoie. Le matin, le soir, la nuit, la semaine, le week-end. Pas de grève pour lui, pas de maladie, de plainte, d’exigences, de sommeil, de pause. Le bonheur absolu d’un patron ce Swing-Bot.
Et pourtant Swing-Bot nettoie. Le matin, le soir, la nuit, la semaine, le week-end. Pas de grève pour lui, pas de maladie, de plainte, d’exigences, de sommeil, de pause. Le bonheur absolu d’un patron ce Swing-Bot. Et surtout quoi que les communicants nous promette, un sérieux concurrent à Mamadou, Youssef ou Mohamed qui balaient la gare depuis trente ans. Un concurrent pour l’emploi oui certainement. Un signal de retour au pays pour tous ces braves gens ? Absolument pas. En fait, B.A.R.Y.L et Swing-Bot sont la preuve formelle que l’immigration-invasion ne peut trouver aucun fondement rationnel dans la fameuse hypothèse du besoin de main-d’œuvre. L’automatisation, la robotisation, la mécanisation et la gestion informatique vont dans les années à venir détruire des millions, des dizaines de millions d’emplois réels. Et pourtant dans les années à venir il rentrera autant si ce n’est plus d’immigrés en Europe. Parce que le migrant est importé pour détruire le socle ethno-culturel là où le super-migrant robot B.A.R.Y.L vient lui nous déposséder de la dernière justification existentielle en économie capitaliste : le travail. Plus de travail et plus d’identité. Joli futur. Alors, qu’est-ce que l’on fait ? On pleure et on disparait? Ou bien on prend enfin conscience de l’impérieuse nécessité d’une révolte des âmes et des esprits contre les robots et les zombies ? A nous de choisir, tout est entre nos mains. Bonne semaine.