Paris Vox- Redécouvrez les grands monuments de Paris, ses rues, ainsi que l’Histoire, petite ou grande, de la capitale.
La rue des Bons Enfants.
La rue des Bons-Enfants est une artère du 1er arrondissement. Elle doit son nom au collège des Bons-Enfants qui y fut fondé, en 1208, en faveur de treize écoliers pauvres. A l’opposé, il existe également une rue des Mauvais-Garçons, une artère du 4e arrondissement.
L’attentat de 1892.
C’est au commissariat de police du numéro 24 de la rue des Bons-Enfants que, le 8 novembre 1892, explosa une bombe qui tua net six policiers. Cette bombe, à l’origine destinée au baron Reille, directeur de la Société des Mines de Carmaux, avait été déposée avenue de l’Opéra, au siège de cette société. Trouvée par le concierge (ou par un balayeur), elle fut emportée par des policiers qui la déposèrent au commissariat où, finalement, elle explosa. Cela ne suscita que peu d’intérêt de la part de la presse qui aurait certainement trouvé plus croustillante la liquidation du baron… ! Cet attentat fut revendiqué par l’anarchiste Emile Henry, ce qui fit l’objet d’une contestation de Félix Fénéon qui, au procès des Trente, le traita de fanfaron. Bref, on ne sut jamais avec certitude qui avait posé cette bombe. Quoiqu’il en soit une petite note trouvée dans L’Almanach du père Peinard pour l’année 1894 relate les faits de cette ironique manière : « 8 novembre 1892. Une petite marmite destinée au Reille, l’exploiteur de Carmaux, s’esclaffa dans le commissariat de la rue des Bons-Enfants. » Ultérieurement, Guy Debord (écrivain, cinéaste et essayiste se réclamant de la gauche révolutionnaire ; 1931-1994) composera une chanson sur cet attentat, La Java des Bons Enfants, qu’il attribuera de manière fantaisiste à Raymond Caillemin, alias « Raymond la Science », un des membres de la bande à Bonnot. Cette chanson sera intégrée dans un recueil de « Chansons du prolétariat révolutionnaire » titré Pour en finir avec le travail, et paru sous forme de disque vinyle, produit par Jacques Le Glou, en 1974, et réédité en CD, en 1998.
Quelques anecdotes de la rue des Bons Enfants.
-C’est au n°11 que l’on trouve le passage Vérité qui permet d’accéder à la place de Valois.
-L’écrivain et poète Gérard de Nerval (1808-1855) habita au n°13.
-Brillat-Savarin (1755-1826), gastronome et épicurien de son état, habita au n°14, en 1794.
-Au n°19 se trouve l’ancien emplacement de l’hôtel de la Chancellerie d’Orléans (également nommé hôtel d’Argenson), monument classé…et néanmoins démonté. Cet hôtel avait été construit en 1705 pour une dame d’Argenton, maîtresse de Philippe d’Orléans, futur Régent de France. Il fut ensuite occupé par les chanceliers des Orléans, les Voyer d’Argenson, qui donnèrent leur nom à l’hôtel. En 1914, sa dernière propriétaire, souhaitant la préservation de cet hôtel, obtint son classement parmi les Monuments Historiques. Las, cela ne fut guère suffisant pour arrêter les iconoclastes de la modernité. Trois ans plus tard, la préfecture de la Seine déclarait d’ « utilité publique », le percement d’une voie entre la Bourse de Commerce et la rue de Valois, histoire notamment de fournir à la nouvelle extension de la Banque de France voisine, une rue de dégagement par le Sud. En 1924, l’hôtel fut déclassé, puis voué à la démolition. Cela provoqua un tel scandale que le préfet de Seine s’en alla demander à la Banque de France de démonter pierres et décors de l’édifice avec promesse de le remonter ailleurs, promesse qui, bien évidemment, ne fut jamais tenue. Les débris de l’édifice restèrent donc stockés dans une centaine de caisses, dans un hangar d’Asnière. Diverses solutions de remontage furent imaginées depuis, mais sans suite. Toutefois, depuis 2011, il est question de restaurer l’hôtel et de le réinstaller dans trois salons de l’ex-hôtel de Rohan-Strasbourg, un édifice de la même époque, aujourd’hui site des Archives Nationales. Une convention a été signée en ce sens entre le World Monuments Fund, le ministère de la Culture et la Banque de France, le 12 juillet 2011. Reste à voir ce projet réellement mené à bien…
-Dans les environs de la rue des Bons Enfants est né La Rochefoucauld (écrivain, 1613-1680) et c’est dans ces mêmes parages qu’en 1764 mourut Jean-Philippe Rameau (compositeur, 1683-1764).
Eric TIMMERMANS.
Sources : « Connaissance du Vieux Paris », J. Hillairet, Editions Princesse, 1982 / « Guide de Paris mystérieux », Les guides Noirs, Editions Tchou Princesse, 1979 (p.172).