Paris Vox a le plaisir de proposer à ses lecteurs une sélection des retranscriptions écrites des chroniques d’Arnaud de Robert, diffusées quotidiennement dans la matinale de Radio Libertés.
Voilà bien l’un des maitres-mots de cette campagne présidentielle. Progressisme dont s’est emparé très tôt Emmanuel Macron, à la fois pour se définir et pour se draper dans cet idéal selon ses dires. Un idéal qui lui ferait affronter les forces obscures du conservatisme, son opposé. Mais qu’est-ce au juste que ce progressisme dont le jeune banquier de Rothschild se prévaut. Et bien, nous dit le dictionnaire, est présentée comme progressiste toute idée qui conçoit le présent comme un progrès par rapport à une époque antérieure jugée plus primaire, plus difficile ou ignorante. Et si le présent n’est pas en progrès, le progressisme conçoit alors un futur fondé sur des valeurs « modernes ». Cette idée qui puise sa source dans les très mal-nommées « Lumières », prétend depuis transformer le monde par la diffusion de la connaissance. Ce concept qui a régné sur la droite libérale comme sur le camp communiste (rappelons qu’en 2009, Robert Hue, ancien secrétaire général du PCF, crée le Mouvement des Progressistes) est donc présenté comme une panacée à l’obscurantisme de la tradition voir des traditions. Bernie Sanders est progressiste, Chavez était progressiste, Merkel est progressiste tout comme Valls et bien sûr Macron. Macron est donc aujourd’hui le champion en France du progressisme. Avec son sourire hollywoodien, son air de premier de la classe, Manu nous promet donc des lendemains qui chantent au doux soleil du Progrès. Mais un progrès par rapport à quoi ? Sur quoi ? Sur qui ? Et pour qui ? Parce qu’au-delà des mots qui enivrent, il faut bien gratter un peu le réel pour découvrir ce que recouvre ce progressisme. Et bien tout d’abord un immense mépris pour tous ceux qui ne le sont pas ou ne s’en revendiquent pas. Oui, celui qui n’est pas progressiste est un obscurantiste idiot et rétrograde. On reconnait bien là la parenté du concept avec les idéaux marxistes-léninistes avec lesquels on est soit d’accord, soit mort. Le progressiste est donc moralement un être supérieur. Il a compris, lui, que le conservateur est un arriéré peu importe le camp et Macron joue finement là-dessus, tapant autant à gauche qu’à droite. Ensuite, le progressisme est surtout le cache-sexe du libéralisme. Pratique pour ne pas effrayer le public de gauche, assez souple pour séduire la droite molle, le progressisme est une version gradualiste du libéralisme. Pas soft, juste moins radicale dans les termes. Ce flou sémantique entretenu là aussi avec soin par Macron permet surtout d’éviter d’introduire le mot « libéral » dans le débat, car ce mot viendrait compliquer la distinction progressisme-conservatisme. Encore une fois l’objectif est de distinguer, au besoin artificiellement et en simplifiant à l’extrême, deux visions du monde qui seraient antagonistes. Son fragile édifice repose tout entier sur cette idée que le progressisme c’est l’avenir là où le conservatisme incarnerait le passé. Tout cela est faux bien sûr et l’histoire politique de notre pays fourmille de positions progressistes prises par des conservateurs, de progressistes anti-libéraux, de conservateurs-libéraux mais pas progressistes, etc, etc.
La réalité de ce pays est qu’il bascule de plus en plus vers des formes, parfois inédites d’ailleurs, de conservatisme
On le voit, le progressisme est avant tout le bébé d’une frange très étroite tant par l’esprit que par le nombre de ce pays. Une frange bobo, privilégiée, planant au-dessus du peuple depuis ses lofts urbains. Et cette oligarchie, persuadée par naissance et aisance financière de détenir la vérité, tend à en faire un dogme et mieux à l’imposer au peuple français, rien que ça. Macron a beau s’extasier sur son succès, la réalité de ce pays est qu’il bascule de plus en plus vers des formes, parfois inédites d’ailleurs, de conservatisme. Depuis le temps que le progrès devait nous rendre heureux à jamais, hein ? Et bien non, il semble qu’au bout d’un siècle et demi, le peuple soit un peu fatigué de cette lumière stérile. Et c’est peut-être pour cela que l’oligarchie a créé Macron. Elle sent la menace qui pèse sur son blabla manipulateur. La condamnation à perpétuité au progrès n’est plus de mise. Macron fait encore illusion dans l’opinion, celle créée médiatiquement par ses copains des médias. Mais le peuple lui semble avoir fait sien le bon mot de feu Michel Crépeau : “Le vrai progrès, c’est une tradition qui se prolonge.” Bonne journée !