Paris Vox – Hier après-midi, lundi 13 juin, des exploitants agricoles sont venus déversés plusieurs dizaines de mètres cubes d’eau sur les grilles et aux portes de la préfecture pour rappeler aux autorités l’urgence de la situation des agriculteurs sinistrés par les récentes inondations. Cette action était soutenue par la chambre d’agriculture d’Ile-de-France, le syndicat FDSEA et certains élus locaux.
Au-delà de l’accélération des remboursements et de la mise en place d’aides pour affronter cette situation de crise, les agriculteurs réclament également le droit de « curer », c’est-à-dire d’entretenir les cours d’eau et les fossés autour et sur leurs propriétés. Une activité ancestrale mais qui leur est interdite depuis quelques années, depuis que cet entretien est confié exclusivement à l’Onema, surnommée « la police de l’eau », un office dépendant du ministère de l’Environnement.
Une revendication qui semble légitime est de bon sens, même si les agriculteurs semblent oublier au passage d’autres pratiques « ancestrales » qui pourraient les prémunir contre les risques d’inondations mais qui ont été mises à bas par les impératifs de l’agriculture intensive et du productivisme à outrance.
On a peu d’arbres et peu de rotation des cultures, donc peu de racines. Le gigantisme des parcelles a entraîné l’utilisation de machines agricoles de plus en plus lourdes, qui tassent le sol. L’eau ne peut plus s’infiltrer ! (Jacques Caplat, agronome)
Ainsi certains écologistes affirment que les conséquences des pluies intensives sont aggravées par des pratiques agricoles délétères pour les sols. En effet, un sol en bon état est riche en matières organiques, c’est-à-dire en petites racines, en petites bêtes et, en particulier, en vers de terre qui creusent des galeries. Le sol est alors poreux, plein de petits trous qui lui permettent d’absorber l’eau. L’agronome Jacques Caplat précise ainsi que des études ont « prouvé qu’un sol vivant pouvait absorber jusqu’à 300 millimètres d’eau par heure ! C’est beaucoup plus que ce qui est tombé lors des inondations. Mais avec l’intensification de l’agriculture, les éponges sont devenues des toiles cirées. On a peu d’arbres et peu de rotation des cultures, donc peu de racines. Le gigantisme des parcelles a entraîné l’utilisation de machines agricoles de plus en plus lourdes, qui tassent le sol. L’eau ne peut plus s’infiltrer ! »
De leur côté, Lydia et Claude Bourguignon, qui dirigent le Laboratoire d’analyses microbiologiques des sols, expliquent que l’utilisation massive des produits phytosanitaires appauvrit dramatiquement les sols, dont le fameux Roundup qui « tue la faune capable d’aérer le sol », et les engrais chimiques qui « minéralisent la matière organique, la brûlent et la consomment trop vite ». De ce fait, « la pluie entraîne la terre, le sol s’érode, la quantité de matière organique diminue. C’est un cycle infernal. »