Histoire de Paris : le nécrophile du cimetière de Montparnasse

Histoire de Paris : le nécrophile du cimetière de Montparnasse

Paris Vox- Redécouvrez les grands monuments de Paris, ses rues,  ainsi que l’Histoire, petite ou grande, de la capitale.


Un sergent trop morbide.

Des profanations en série.

En 1847, c’est à Bléré (Indre-et-Loire) que lon constata la première dune étrange série de profanations de sépultures. L’épouse du fossoyeur dit qu’elle avait cru voir, sur le lieu du crime, un jeune soldat qui se tenait dans les ténèbres. Plus tard, dautres profanations du même genre furent commises au cimetière du Père-Lachaise. Mais une nuit, un gardien du cimetière découvrit blotti dans une nouvelle fosse, un militaire de 25 ans. L’épouse du fossoyeur de Bléré avait donc vu juste. Le militaire se nommait Francis Bertrand et était engagé volontaire au 74e de Ligne, avec le grade de sergent. Au moment des faits, il était revêtu de son habit militaire. Le sergent prétendit être venu là, à un rendez-vous damour et avoir été surpris par le sommeil. On crut à son histoire et il fut reconduit à la caserne de Reuilly. Mais les profanations reprirent bientôt, mais à Ivry cette fois. Une petite fille de sept ans, emportée par une maladie foudroyante, y avait été enterrée. Dans la nuit qui suivit ses funérailles, on découvrit son cercueil ouvert et son corps mutilé : on lui avait arraché le cœur.

Au cimetière Montparnasse.

Les profanations sétendirent par la suite au cimetière Montparnasse. Le 30 juillet 1848 et durant les semaines qui suivirent, les gardiens trouvèrent des cadavres de femmes arrachés à leurs tombeaux et abandonnés ensuite, mutilés, dans les allées peu fréquentées. On décida alors de tendre un piège au nécrophile : un canon de fusil, chargé de mitraille et pourvu dun mécanisme automatique rudimentaire, fut pointé vers un haut mur où lon avait remarqué des traces descalade. Les mois passèrent et lon finit par désespérer, lorsque le 15 mars 1849, vers minuit, une détonation se fit entendre. Après exploration du terrain, on découvrit des traces de sang. On remonta la piste et on finit par découvrir quun sergent du 74ème de ligne avait été grièvement blessé et admis au Val-de-Grâce où lon retrouva le sergent Francis Bertrand. Sous-officier de bonne conduite et au service irréprochable, comment aurait-on pu le soupçonner ? Il fit pourtant des aveux complets, déclarant notamment que, certaines nuits, il avait été jusquà ouvrir dix à quinze cercueils et quil éprouvait un abominable plaisir à mutiler les cadavres, à leur arracher les entrailles et à en disperser les lambeaux. Le sergent nécrophile fut condamné à une peine de prison de quelques mois et à une amende. Il accomplit sa peine au bagne de Belle-Ile, puis disparut à jamais.

Un mot sur le cimetière Montparnasse.

A l’emplacement du cimetière Montparnasse, étaient jadis établies trois anciennes fermes. Au 17e siècle, ce terrain devint la nécropole privée des religieux de Saint-Jean-de-Dieu, plus connus sous le nom de « Frères de la Charité ». Et il en fut ainsi jusqu’à la Révolution. On dit que les séminaristes de la maison des jésuites de Vaugirard venait s’y reposer autour d’un moulin à farine dont il subsiste encore une tour, classée monument historique, le 2 novembre 1931. Au début du 19e siècle, le préfet de la Seine, Nicolas Frochot, fit acheter le terrain pour y édifier un nouveau cimetière, à cette époque situé à l’extérieur des murs de la ville. La première inhumation eut lieu le 25 juillet 1824. Dès l’année suivante et jusqu’en 1883, le cimetière comprenait un « champ de navets », entendez, dans le langage du bagne, une fosse commune où l’on enterrait les cadavres des condamnés à mort. Ce « champ de navets » fut, par la suite, transféré à Ivry. Agrandie en 1847, la surface de la nécropole fut diminuée en 1891 suite à l’élargissement de la rue Froidevaux et le percement de plusieurs rues adjacentes. Situé au sud de Paris, le cimetière Montparnasse apparaît aujourd’hui, avec ses 19 hectares et ses 35.000 concessions, comme le second cimetière de la ville. Il apparaît également comme un important espace vert planté de 1200 arbres. Parmi les personnalités enterrées au cimetière Montparnasse on compte notamment Charles Baudelaire, Emil Cioran, Guy de Maupassant, Alfred Dreyfus, Camille Saint-Saëns, Gérard Oury, Philippe Noiret. Le nom de Montparnasse rappelle, bien évidemment, celui du Mont Parnasse, montagne grecque qui surplombe Delphes. Ce n’est pas un hasard : avant 1725, un amas de gravats formait une colline artificielle sur l’actuel carrefour entre le boulevard Montparnasse et le boulevard Raspail que, par dérision, les étudiants du quartier latin avaient nommé le Mont Parnasse.

Eric TIMMERMANS.

Sources : Guide Paris mystérieux, Les Guides Noirs, Editions Tchou Princesse, 1978, p. 310-312.