Tribunal administratif de Paris : publicité numérique c’est non!

Tribunal administratif de Paris : publicité numérique c’est non!

Paris Vox-La lecture de la dernière mouture de la lettre du tribunal administratif de Paris est fort intéressante. La décision du retrait des publicités numériques est expliquée en profondeur.


La revue recèle, comme à chaque parution, d’une sélection de décisions prises par le tribunal administratif de Paris. Le numéro 50, qui  concerne les six derniers mois de l’année, est consultable en suivant ce lien :http://paris.tribunal-administratif.fr/Media/TACAA/Paris/Lettre-du-TA/Lettre-n-50

Parmi les articles de la lettre d’information, une décision de justice a particulièrement retenu notre attention.

Celle-ci concerne le déploiement de la publicité numérique. Il s’agit de publicités sur écrans. Certains abribus étaient équipés de ce sytème avant la décision du tribunal qui rappelle que le règlement local de publicité de la ville de Paris n’autorise pas la publicité numérique.

Le juge du référé précontractuel a donc annulé la procédure de passation du marché qui prévoyait l’utilisation de publicité numérique.

C’est donc pour cela que les publicités numériques qui fleurissaient l’an passé dans Paris ont dorénavant disparu. Cette disparition n’est peut être que temporaire; la mairie de Paris s’étant pourvue en cassation afin de faire appel de cette décision.

Ci-dessous l’extrait de la décision du tribunal administratif de Paris :


“La ville de Paris a engagé en mai 2016 une procédure en vue du renouvellement et de l’exploitation de mobiliers urbains d’information à caractère général ou local supportant de la publicité. L’avis de la concession publié par la ville de Paris au bulletin officiel des annonces des marchés publics prévoit que les mobiliers urbains, objets de la concession, « pourront supporter de l’affichage et de la publicité non lumineuse ou éclairée par projection
ou transparence, voire numérique à titre accessoire. » .L’article 1.3 du document de
la consultation prévoit que « dans une proportion qui ne saurait excéder 15 % des mobiliers mis en place au titre de la concession, les mobiliers pourront supporter de l’affichage et de la publicité numérique ».
L’entreprise choisie au terme de cette procédure doit assurer l’affichage, pour le compte de la ville de Paris, d’informations à caractère général ou local et est, dans ce cadre, chargée de la conception, fabrication, pose, entretien, maintenance et exploitation de 1 630 mobiliers urbains à compter du 1er janvier 2018.
Les sociétés Clear Channel France et Extérion Média France, qui avaient informé la ville de Paris de ce qu’elles renonçaient à déposer une offre en raison des doutes qu’elles nourrissaient sur la légalité du règlement de la consultation, ont chacune saisi le juge du référé précontractuel, sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, pour lui demander d’annuler la procédure de passation en cause au terme de laquelle, le 28 mars
2017, la société Somupi, filiale de la société JC Decaux, a été désignée attributaire de la concession de services.
Les sociétés requérantes ont fait valoir que les documents de la consultation qui prévoient que les mobiliers urbains d’information pourront supporter de l’affichage et de la publicité numérique, définissent des conditions d’exécution du marché contraires à la réglementation
de la publicité applicable à Paris et qu’ainsi, le non respect de la règlementation applicable à la concession de services en cause constitue un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence

Le juge des référés a jugé qu’en vertu des dispositions des articles R. 581-34 et suivants du code de l’environnement, la publicité numérique est une forme de publicité lumineuse, laquelle est autorisée notamment dans les agglomérations de plus de 10 000 habitants.
Il a constaté cependant que la publicité lumineuse, et donc la publicité numérique, est interdite à Paris, à l’exception des dispositifs publicitaires installés sur les toitures-terrasses, en vertu du règlement local de la publicité, des enseignes et pré-enseignes, approuvé par le conseil de
Paris les 20 et 21 juin 2011 et arrêté par le maire de Paris le 7 juillet 2011, toujours en vigueur, dont le titre II est relatif à la publicité et aux pré-enseignes.
Le juge des référés a jugé que l’interdiction, de portée générale, que ce règlement édicte s’applique également aux publicités supportées par le mobilier urbain, sans qu’y fassent obstacle, contrairement à ce que soutenait la ville de Paris, les dispositions de l’article P1.1 du titre II du règlement relatives à sa portée et selon lesquelles « Les intitulés des titres, chapitres, articles déterminent le champ d’application des dispositions qui en relèvent ». Il a relevé que si les articles P3 et suivants du titre II traitent de la publicité sur le mobilier urbain sans mentionner la publicité lumineuse, les dispositions des articles P4 et suivants, du même titre II, relatifs à la publicité lumineuse, règlementent les seuls dispositifs publicitaires installés sur les toitures-terrasses, après avoir posé le principe de l’interdiction de la publicité
lumineuse et que, dès lors, les articles P4 et suivants du règlement ne peuvent pas être appliqués indépendamment des autres articles du même titre.
Les conditions d’exécution du marché prévues par les documents de la consultation étant pour partie contraires à la réglementation de la publicité applicable à Paris, le juge des référés a jugé que le non respect de la règlementation applicable à la concession de services en cause constitue un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence, qui a conduit à retenir une offre irrégulière en tant qu’elle propose de la publicité numérique pour 15 % des mobiliers urbains à mettre en place.
Enfin, il a jugé que ce manquement est susceptible d’avoir lésé chacune des sociétés requérantes qui ont fait valoir que le manquement en cause les a conduites à ne pas présenter d’offre, au motif qu’elles ne pouvaient le faire sans risque pour la sécurité juridique et la pérennité de la concession et qu’elles ne pouvaient pas envisager de proposer une offre sans numérique vu les attentes de la ville de Paris en la matière.
La procédure de passation de la concession de service en cause a donc été annulée par deux ordonnances du 21 avril 2017. Ces ordonnances ont fait l’objet d’un pourvoi en cassation. “

Décision du Tribunal administratif de Paris.