Paris Vox – Depuis quelques semaines, on observe une remise en question des décisions prises par la centrale à Paris dans différentes sections de la CGT. Ultime épisode, la CGT énergie interpelle sa direction aujourd’hui dans une lettre ouverte.
La confédération générale du travail fondée en 1895 est le syndicat numéro 1 en France. Elle revendique 680 000 adhérents. Lors de l’entre deux tours de la présidentielle, on a pu apercevoir diverses tensions entre différentes fédérations et le comité fédéral. Ainsi, plusieurs sections ont dévié de la ligne de la « maison mère » en mettant dos à dos Marine Le Pen et Emmanuel Macron et en se mobilisant contre les deux finalistes de la présidentielles alors que la ligne officielle était pour le rejet de « l’extrême droite ».
La manifestation organisée le 8 mai et intitulé « Front Social », qui avait réuni plusieurs milliers de personnes, s’était faite sans l’assentiment de la centrale CGT au regret des différentes sections qui tenaient le pavé pour appeler à la résistance face au programme de casse sociale programmé du président nouvellement élu.
Nouvelle preuve des dissensions entre la centrale et la base, la diffusion aujourd’hui d’une lettre ouverte émanant de la CGT Energies Paris destinée à la Confédération.
« Cher(e)s camarades,
Par cet écrit, notre syndicat CGT Énergie Paris tient à interpeller la Commission Exécutive confédérale suite à sa déclaration du 10 mai 2017 (lire ci-dessous).
Autant vous dire que ce communiqué n’est absolument pas à la hauteur des enjeux en cette période bien trouble.
Dans la première partie, vous revenez sur les dangers que représente l’extrême droite et sur la position confédérale qui appelait « les salariés à ne donner aucune voix à ce parti raciste », ce que nous partageons totalement, bien qu’il nous semble qu’une analyse un peu plus poussée de la mécanique de l’élection présidentielle aurait été la bienvenue.
Quant à « l’exigence d’une Europe sociale et solidaire », cette revendication nous paraît impossible à obtenir dans le cadre existant de l’Union Européenne, où la souveraineté des peuples est piétinée par la technocratie de Bruxelles au service du capital.
Mais ce qui est le plus problématique dans cette déclaration et qui a provoqué une certaine colère chez nos militants, se trouve dans la deuxième moitié de votre écrit.
En effet, vous faites un certain nombre d’incantations et d’avertissements en direction de Macron et de son futur gouvernement, qui de notre point de vue sont complètement stériles et donc inefficaces.
Vous écrivez en ce sens « ceux qui demain seront au gouvernement et au parlement doivent être conscients de la lourde responsabilité de leurs actes et des politiques qu’ils mettront en œuvre. Ne pas stopper celles qui ont conduit à une telle situation nous condamnerait à la revivre. »
Et à propos du vote du second tour vous écrivez « …considérer qu’il s’agirait là uniquement d’un vote d’adhésion et un blanc-seing à son programme, comme il l’a fait, jusqu’aux derniers instants de sa campagne, aux risques de renforcer le FN, serait irresponsable. »
Et de finir sur ce sujet par cette phrase « la CGT appelle solennellement Emmanuel Macron à renoncer à imposer de nouveaux reculs sociaux par ordonnance ou 49.3. »
Pour nous, cette posture est vraiment problématique et naïve car au travers de ces déclarations vous en appelez à la responsabilité de Macron, comme si ce dernier n’était pas le représentant de la haute finance, comme si ce dernier œuvrait en conscience pour les intérêts du peuple, et qu’il était juste dans l’erreur.
Il est évident que Macron est un pur produit du système capitaliste et qu’il est parfaitement conscient de ce qu’il fait et pour qui il le fait.
Ce qui est clair pour nombre de nos militants au travers de cette élection, c’est que le patronat ne s’embarrasse même plus de choisir un porte flingue parmi les 2 grands partis traditionnels (qui d’ailleurs ont été provisoirement laminés), il a directement désigné un homme du sérail, un banquier, car on est jamais mieux servi que par soi-même.
D’ailleurs, c’est grâce aux médias de masse détenus par les grands oligarques, que le produit Macron a été vendu avec succès au peuple français.
C’est pourquoi, Macron écoutera la voix de ses maîtres et travaillera avec zèle, au démantèlement de tous les conquis sociaux obtenus dans la rue par notre classe sociale.
Quant au risque de renforcer le FN, Macron n’en a que faire, pire il l’encouragera par sa politique antisociale, puisque c’est justement la présence de ce parti fasciste, qui sert d’épouvantail au capital pour porter au pouvoir ses serviteurs les plus zélés depuis 30 ans.
Comme vous le notez justement, dans cette période « les luttes n’ont jamais été aussi nombreuses ».
Alors pourquoi ne pas proposer un véritable calendrier d’actions pour les semaines à venir, avec comme objectifs impérieux, de confédérer les luttes, afin de tenter d’organiser un grand mouvement national, massif, coordonné, de tout le monde du travail et d’aller reprendre par la lutte, tout ce que le capital nous a volé et d’obtenir de nouveaux conquis sociaux.
Cette démarche aurait en plus une vertu fondamentale, c’est d’imposer notre calendrier revendicatif, afin de lutter non pas contre une énième contre-réforme, mais bien pour nos revendications de salariés, de citoyens.
Alors que l’on sait que le train libéral est lancé à pleine vitesse contre le monde du travail et le peuple français, n’attendons pas qu’il nous écrase dès cet été, rentrons dans l’action dès maintenant.
Et cela mérite d’exprimer la volonté de la CGT de combattre la politique Macron par les mobilisations, sans attentisme.
Effectivement les luttes partout dans le pays n’ont jamais été aussi nombreuses, des fronts sociaux s’organisent partout dans le pays autour de structures CGT et autres, et la répression envers nos militants n’a jamais été aussi forte.
Il est de la responsabilité de la plus grande organisation de masse en France, notre CGT, de mener l’offensive de classe et de masse du monde du travail face à un pouvoir qui nous promet la ruine sociale et de nouvelles guerres impérialistes au sein de l’Otan pour notre peuple.
Fraternellement.
Le Syndicat CGT Energie Paris
Paris le 16 mai 2017 »
Les mots sont pesés mais ne laissent pas de place au doute, il y a un malaise entre la base et la centrale, cette lettre émanant de la section énergie en est la preuve !