Paris Vox a le plaisir de proposer à ses lecteurs une sélection des retranscriptions écrites des chroniques d’Arnaud de Robert, diffusées quotidiennement dans la matinale de Radio Libertés.
L’énorme cirque médiatique des primaires m’avait déjà inquiété. Je vous en avais parlé en vous disant tout le mal que je pensais de ce basculement définitif du champ politique dans le champ médiatique. On notait d’ailleurs la mine réjouie de la clique des interviewers, censeurs et chefs d’orchestre d’un ballet désormais dirigé par eux seuls. Le pouvoir médiatique était déjà exorbitant, les primaires l’ont rendu omnipotent. Et la caste journalistique, autorisée par ses maitres-argentiers à mordre du politicard ne s’en prive pas. Elle en abuse même, dépassant le cadre politique et menaçant ce qui reste de justice et de liberté dans ce pays.
Pour la première fois du moins de manière aussi nette, le « tribunal médiatique » supplante largement la justice institutionnelle
A ce titre, l’affaire Fillon constitue un précédent qui n’a pas d’équivalent dans l’histoire de la cinquième république. Pourquoi ? Et bien parce que pour la première fois du moins de manière aussi nette, le « tribunal médiatique » supplante largement la justice institutionnelle. Le quotidien n’est pas rythmé par les révélations des enquêteurs, les conférences de presse du parquet, mais par la sortie du Canard Enchainé, lui-même dûment abreuvé par des fuites ministérielles. Mieux même, les différentes investigations policières le sont sur la seule base des éléments sortis par le Canard et repris par toute la presse. On savait déjà que la presse poulailler faisait l’opinion. On sait maintenant qu’elle fait aussi la justice, au détriment du droit. Comme vous le savez, je n’ai pour Fillon aucune espèce d’accointance, de sympathie ou d’empathie. Mais en droit il existe des règles qui exigent qu’une affaire soit jugée sur le fond. Et tant que ceci n’est pas établi, la présomption d’innocence reste de mise. Or, dans l’affaire Fillon, le tribunal médiatique a déjà condamné Fillon. Au nom d’ailleurs d’une morale dont tous les plumitifs se gargarisent sans en avoir jamais touché les rivages. Au nom de cette morale, tous les marqueurs de l’Etat de droit ont été foulés : présomption d’innocence comme je viens de le rappeler, mais aussi secret de l’instruction et surtout enfin séparation des pouvoirs, tant la proximité du Parquet National Financier semble grande avec le gouvernement en place. L’affaire Fillon prouve que la fin justifie les moyens et montre surtout qu’au-delà du scandale Fillon bien réel, il y a une volonté politique et stratégique dont les médias sont les vecteurs principaux.
A qui profite le crime ? A tous les opposants à Fillon, Macron en tête.
A qui profite le crime ? A tous les opposants à Fillon, Macron en tête. Il suffit juste de voir à qui appartiennent les groupes de presse, n’est-ce pas ? Mais, cela va plus loin car le scénario vient de se répéter hors du champ politique avec l’affaire Théo. Là aussi, au nom d’une morale et d’une bien-pensance hors-sol, la presse a fait de Théo la victime et des policiers les bourreaux, sa pression obligeant même dans un premier temps le juge à retenir l’accusation de viol, ce à quoi s’opposent aujourd’hui les conclusions des pourtant très rigoureux Bœuf-carottes de la police des polices. Là aussi, sous la pression de la presse et contre toutes les règles éthiques de sa fonction, Hollande s’est porté au chevet de la victime présumée et le gouvernement l’a assuré de sa solidarité. Théo, icone médiatique, parée de toutes les vertus est en passe d’accéder au statut de Juste. Que sait-on de lui ? Rien. Que faisait-il là en pleine opération policière contre un deal d’envergure ? Mystère. Mais tout cela est secondaire car la morale médiatique est sauve. Cette morale qui suinte la dignité bourgeoise gauchiste. La même qui vomit Trump et s’étouffe aux résultats du Brexit. Cette morale dissolvante dont le rôle de supplétif oligarchique n’est plus à démontrer. Et c’est bien tout l’enjeu de ces prochaines années : leur morale contre nos principes. Bon week-end !