Tous coupables, et alors ?

Tous coupables, et alors ?

Paris Vox – Dorénavant, Paris Vox publiera régulièrement la retranscription écrite de la chronique de commentaire d’actualité d’Arnaud de Robert diffusée dans la Matinale de Radio Libertés. Aujourd’hui, notre chroniqueur revient sur la corruption qui ronge le système politique français.


 

« Moi président, je ferai en sorte que nos élus soient irréprochables. Le changement c’est maintenant ». Il est bon parfois de rappeler les promesses de ceux qui nous gouvernent ne serait-ce que pour les confronter à la réalité. Rassurez-vous, je ne vais pas revenir sur la rocambolesque affaire Cahuzac. Tout a déjà été dit là-dessus. Mais connaissez-vous Sylvie Andrieux ? Non ? J’avoue que jusqu’à il y a quelques semaines je ne connaissais pas non plus cette dame et son histoire.
Sylvie Andrieux, la fille d’un baron du defferrisme marseillais, est une figure de la politique loco-régionale en PACA. Réélue députée du Parti Socialiste en 2012 avec seulement 699 voix d’écart face à Stéphane Ravier du Front National, cette dame a été, de 2005 à 2008, vice-présidente du conseil régional en charge de la politique de la Ville. Et c’est à ce titre qu’elle a été condamnée le 23 septembre dernier pour détournements de fonds publics par le tribunal d’appel d’Aix-en-Provence à quatre ans de prison dont un ferme, 100 000 euros d’amende et une peine complémentaire de cinq ans d’inéligibilité. Pour résumé l’affaire, Sylvie Andrieux a versé 716 593 euros à une série d’associations totalement fictives montées par des escrocs dont plusieurs ont été condamnés depuis. Le tribunal a montré qu’elle connaissait ces associations et leur caractère frauduleux. Il a aussi démontré que la seule motivation de ces versements était électoraliste, visait à augmenter sa popularité et soigner ses votes. Quatre ans de prison dont un ferme. Une peine pour le moins exemplaire qui devrait dans l’absolu calmer quelque peu les pratiques de clientélisme trop souvent répandues chez nos élus. Quatre ans de prison dont un ferme.

Pour résumé l’affaire, Sylvie Andrieux a versé 716 593 euros à une série d’associations totalement fictives montées par des escrocs

Comme je suis curieux, j’ai cherché où cette dame avait pu être incarcérée. Peine perdue si vous me passez le jeu de mot, car madame Andrieux n’est pas en prison. Mieux, elle est toujours députée et siège toujours à l’assemblée nationale. Je sais c’est totalement hallucinant. Mais peut-on encore être surpris par cet état de fait de nos jours ?
Madame Andrieux et ses avocats se sont pourvus en cassation, procédure qui a un caractère en partie suspensif. Le Parti Socialiste, lui s’est contenté de lui demander de quitter les rangs du groupe socialiste de l’assemblée nationale, même pas de démissionner. Madame Andrieux siège donc en non-inscrit et se rend à l’assemblée nationale avec un joli petit bracelet électronique à la cheville pour … voter des lois et encaisser ses indemnités. Oh, elle se fait discrète dit-on. Mais tout de même et pour rappel le salaire brut d’un député est de 5 189 euros par mois auxquels s’ajoute 5 771 euros mensuels de frais de mandat. Un total rondelet de 9 138 euros par mois et ce sans compter les billets d’avion, le train et le métro gratuits, le bureau, le téléphone, le chauffeur, la secrétaire et l’accès pour quelques euros à l’une des meilleures tables de France, le célèbre restaurant de l’assemblée nationale. Tout cela payé avec nos impôts bien entendu.

Madame Andrieux siège donc en non-inscrit et se rend à l’assemblée nationale avec un joli petit bracelet électronique à la cheville pour … voter des lois et encaisser ses indemnités.

Connaissez-vous en France un détenu aussi bien traité ? Le cas de madame Andrieux est parfaitement emblématique de l’état de notre pays devenu en quelques décennies une poubelle débordante de corruption. Il démontre également que l’effondrement de la norme, de l’idéal de vertu est d’abord et le plus souvent le fait des classes dirigeantes. L’effondrement vient d’en haut et ses conséquences sont désastreuses dans le corps social. La corruption des élites introduit l’idée dévastatrice que pour réussir et vivre il faut tricher, mentir, détourner et cacher. La corruption est le meilleur dissolvant de l’éthique, de l’honneur, de la parole donnée. La corruption non sévèrement punie est le ferment de la gangstérisation du peuple. Quand je pense que plusieurs candidats aux primaires ont été condamnés ou ont encore des dossiers en justice, il me vient des idées impossibles à détailler ici.

Enfin, quand vous remplirez vos déclarations d’impôts ayez une pensée émue pour madame Andrieux, vous contribuez avec délice à la bonne vie d’une délinquante. Allez, bonne journée quand même !