Paris Vox – Chaque semaine, en partenariat avec Radio Libertés, nous publions la retranscription écrite de la chronique d’actualité et d’analyse d’Arnaud De Robert. Aujourd’hui, il revient sur le drame de Millas et met en cause la responsabilité de l’Etat.
J’aurais pu vous parler ce matin de l’élection de Miss France et de la polémique quasi-automatique qui l’a suivie, j’aurais pu également évoquer le fastueux anniversaire d’Emmanuel Macron à Chambord, je pourrais aussi revenir sur les infinis débats qui ont accompagné le décès de Johnny Hallyday, les rebondissements du dossier de l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, l’éviction de l’animateur Tex de France 2 pour une blague supposément sexiste, la sortie du dernier Star Wars ou encore la tragédie « nationale » que constitue le décès de la maman de Stéphane Plazza. Mais je ne traiterai pas tous ces sujets tout simplement parce qu’ils font la Une des médias sponsorisés. Non, moi voyez-vous je suis resté bloqué sur la tragédie de Millas dans les Pyrénées Orientales. Enfin quand je dis tragédie, je suis là encore victime d’un vocabulaire aseptisé et fabriqué par les grands médias. Scandale, honte, incongruité, aberration, horreur injustifiée devraient bien plutôt décrire ce qui s’est passé.
Et ce qui s’est passé ne se résume pas, comme on le lit à longueur de colonnes encore une fois dans les grands médias, à savoir qui de la SNCF ou de la conductrice du car est à l’origine du drame. Car je le précise tout de suite, cela n’a mais vraiment aucun intérêt aujourd’hui. Pourquoi ? Hé bien parce que le fait de savoir que 98% des accidents sont dus aux comportements à risque des usagers et que ceci laisse donc 2% des sinistres à la SNCF ne fera pas revenir à la vie les cinq adolescents décédés et les dix autres grièvement blessés. Cela ne règlera rien, absolument rien. Tout ce qui est profilé aujourd’hui dans ces débats est la recherche de responsabilité circonstancielle, celle qui va permettre de désigner rapidement un coupable et de clore par là même l’accident et ses effroyables conséquences. Or à mes yeux, ce ne sont ni la SNCF ni la conductrice qui devraient former demain le ou les coupables idéaux.
Parce que le seul coupable, le seul est à mon sens l’Etat français dans toutes ses incarnations ces quarante dernières années.
Parce que le seul coupable, le seul est à mon sens l’Etat français dans toutes ses incarnations ces quarante dernières années. Oui l’Etat français et ses énarques, l’Etat français et ses idéologues démagos, l’Etat français et sa monstrueuse froideur quand il s’agit des malheurs du petit peuple. Il existe 15 300 passages à niveau en France. Il y en avait 25 000 en 1980. En 37 ans on en a donc supprimé seulement 10 000. On dit que cela coûte cher (entre 3 et 10 millions d’euros de travaux par passage). Pourtant on dénombre chaque année plus d’une centaine de collisions et une trentaine de morts. Pas très grave me direz-vous, pas un gros chiffre. Oui mais la question n‘est pas là. Car cette histoire de passages à niveaux s’ajoute à la longue liste des risques idiots qui pèsent chaque jour sur les français comme ceux d’emprunter la RCEA, la RN 20, la RN 4 ou la RD1, toutes surnommée depuis quarante ans « routes de la mort ». Ont-elles été aménagées ? A peine pour certaines. Le dédain des pouvoirs publics pour ces infrastructures mortifères est simple. Il ne concerne jamais les grands axes de communication nationaux, sur lesquels d’ailleurs vous ne trouverez jamais un passage à niveau. Non, ils font partie des problèmes locaux, ceux de cette France soit-disant attardée des petits villages, de cette France désertée par l’Etat, par la puissance publique. Alors quand un drame comme celui de Millas arrive, on déroule le grand plan de communication médiatique destiné à masquer tout cela. Ministres et présidents vont serrer des louches, écraser quelques larmes. On aura quelques marches blanches, un(e) responsable et coupable désigné. Et puis, la machine judiciaire se mettra en marche. On achètera le réel avec de l’argent, la peine avec de la fatigue et du fatalisme. Et l’on se gardera bien de calculer combien on peut sécuriser de routes ou supprimer de passages à niveaux avec les milliards que l’on dépense chaque année pour l’immigration légale et illégale, pour la socialisation, le logement, le soin et l’insertion de centaines de milliers d’immigrés, pour l’aide stérile aux pays sous-développés, dans le financement d’associations bidons, de projets bruxellois nébuleux, etc. Et l’on oubliera de dire surtout que tout cet argent est le nôtre, celui de nos impôts. Et après on se demande pourquoi je prône la désobéissance civile. Allez, bonne semaine.