Paris Vox – En partenariat avec la revue littéraire non conforme Livr’arbitres, retrouvez désormais régulièrement sur Paris Vox une sélection d’extraits de textes littéraires évoquant Paris et l’Ile de France, leur histoire, leurs habitants, leurs rues et leurs monuments…. Aujourd’hui, Joseph Delteil.
“Lorsque, vers les huit heures du matin, un jour de printemps, un baluchon sur l’épaule et les yeux bien ronds, le Petit provincial débarque à la gare P.-L.-M., à Paris, comme sa poitrine est large, et son cœur ! Il ouvre toutes ses fenêtres, tous ses pores. L’air frais aère sa cervelle, ses sens. L’odeur de la ville, cette odeur de pierre et de bête, entre dans ses narines comme un fleuve. Toutes les énergies physiques de son être sont à l’émerveillement. Est-il né dans une maison des champs, du côté de Limoux en France, ou bien en quelque cahute du Capricorne ? Qu’importe ! Il n’est aujourd’hui qu’un jeune assemblage d’atomes encore peu cohérents, mais avides, une poignée de cellules dans toute leur spontanéité. Il n’a nul souci des Pourquoi et des Comment. Il est tout poreux, perméable. Paris le traverse comme un tamis. Il regarde ces hautes bâtisses semblables aux Pyramides, ces autobus tangueurs et ces champs de choux de piétons : quelle aisance dans la démarche de son âme ! Pas un instant il ne se sent inférieur à un taxi, à un palais. Il entre de plain-pied dans la Ville comme dans son domaine, sur le cheval blanc de sa simplicité. Tout cela, tout cela fait partie de l’administration de son rêve. Il ne connaît pas d’autres limites que celles de l’œil nu.”