Paris Vox a le plaisir de proposer à ses lecteurs une sélection des retranscriptions écrites des chroniques d’Arnaud de Robert, diffusées quotidiennement dans la matinale de Radio Libertés.
Un des thèmes de cette campagne des présidentielles qui apparait et apparaitra sûrement comme l’un des plus saillants est ce que la presse a baptisé « la volonté de changement ». Selon les journalistes, il y aurait donc en France un courant puissant en faveur d’un renouvellement des élites, en faveur d’un grand nettoyage, d’un dégagisme généralisé des politiciens. Je ne nie absolument pas le ras-le-bol profond d’une grande partie de nos concitoyens, d’un écœurement à grande échelle vis-à-vis de ceux prétendent nous gouverner tout en étant pleinement absorbés par la seule satisfaction de leur ambition personnelle. J’ai longtemps partagé ce sentiment de dégoût.
Et si je m’en détache quelque peu aujourd’hui, ce n’est ni par cynisme ni par défaitisme et encore moins parce que je trouverais des vertus à Fillon, Macron ou Hamon. Non, si je ne crois pas à l’effet « coup de balai » c’est tout simplement parce qu’il ne marche pas, il ne change rien. Les exemples pullulent, innombrables à travers l’Histoire qui nous montrent des élites chassées, remplacées et finalement copiées et dépassées par leur remplaçants. Et je ne dis pas cela parce que je goûte fort peu à la démocratie. Ce trait de dégénérescence, ce cycle involutif permanent traverse toutes les époques et les régimes. Poutine, présenté comme l’homme du changement est issu de la structure la plus soviétoïde de l’ex-URSS, le KGB. Les actuels leaders de l’Ukraine martyre sont les anciens apparatchiks de second rang de Yanoukovitch. Macron est né chez Rothschild, et la moitié des leaders européens vient de chez Goldman-Sachs. Et quand ils ne viennent des sérails oligarchiques leur décrépitude burlesque est encore plus rapide comme le prouvent les scandales qui embourbent le Parti Cinq Etoiles de l’humoriste Pepe Grillo en Italie. Bouffon un jour, bouffon toujours. Le pouvoir corrompt, à tout moment, à tout niveau. C’est un fait inhérent à la nature humaine. Mais pas tout le monde. Et il reste dans ce pays des hommes de biens.
Les exemples pullulent, innombrables à travers l’Histoire qui nous montrent des élites chassées, remplacées et finalement copiées et dépassées par leur remplaçantsL’illusion du changement
Dans le village normand de mon enfance, le maire, un brave paysan sans étiquette et donc conservateur terrien est élu et réélu depuis 1977. Dans quelques semaines il fêtera donc ses quarante ans de mandature. Certains vont me dire : normal en milieu rural, le conservatisme, les habitudes ont la vie dure. C’est vrai la terre ne ment pas. Mais c’est oublier un peu vite que la télé et internet innervent maintenant ces petites communes. Non, ce qui caractérise cet homme c’est tout simplement son intégrité. A chaque élection, le maire présente un programme et des engagements et à chaque fin de mandature, il publie un bilan. Force est de constater que la plupart des propositions ont à chaque fois été matérialisées par des réalisations concrètes, malgré les restrictions budgétaires de l’État, le chômage galopant et la désertification rurale. Oui cet homme, dont je dois en plus rappeler qu’il est bénévole, cet homme est intègre. Ernst Jünger a écrit sur la figure du Rebelle, du Partisan ou encore de l’anarque. Il reste je crois à écrire la figure de l’Intègre. Et autant je ne crois pas au changement de personnes, surtout adoubé par les médias et donc vraie farce, vrai leurre du Système et simple remplaçisme, autant je pense fermement que le recours à l’intégrité est une arme qui reste entre nos mains. De cette intégrité qui a fait sortir nos aînés des tranchées, de cette intégrité du 6 février 1934, de celle de la marche sur Rome, de celle du commandant de Saint Marc, des grèves de faim de Bobby Sands et de ses hommes, de celle qui a tué Yann Piat et plus près de nous de celle qui anime les lanceurs d’alertes autour des projets comme Wikileaks. Oui cette intégrité à un prix. Mais elle n’est rien à côté de la dignité d’homme. Et surtout, elle ne se décrète pas ni ne s’obtient avec les lois. Elle se fonde sur une verticalité d’âme faite du refus de la compromission, du refus du jeu oligarchique, fondée sur le dédain de l’abrutissement ludico-consommatoire et sur des principes d’éducation dont nous pouvons encore nous rendre maitres. Devenir et forger des hommes intègres voilà notre pouvoir, notre devoir et notre destin. Servir et non se servir, telle pourrait être notre devise. Bonne journée !